Quelles sont les conséquences de la pollution et des pollens sur la rhinite allergique dans le territoire d’Aix – Marseille et de l’Etang de Berre ?
Contexte
Lancée en juin 2021, l’étude Mistral avait pour objectif de rechercher des liens entre les pollens, la pollution atmosphérique et les symptômes de la rhinite allergique. L’étude a utilisé l’application mobile MASK-air® qui permet aux participants de surveiller leurs symptômes allergiques et leur asthme. Les données sur les symptômes, les traitements et l’impact quotidien ont été recueillies auprès de participants volontaires.
Le nom de “Mistral” fait écho à la population de cette étude car elle ciblait les habitants des territoires d’Aix, de Marseille et de l’Etang de Berre, une zone fortement industrialisée.
L’étude s’inscrit dans le cadre d’un projet plus global appelé Mask@PACA qui, après la phase de mise en évidence de l’impact environnemental sur la santé, visait le déploiement d’une solution préventive. Celle-ci permettrait aux citoyens de disposer de prédictions des pics d’allergènes et de pollution au moyen d’une application mobile.
Le projet Mask@PACA, initié par la société KYomed INNOV, a réuni les expertises de divers partenaires : ATMOSUD, RNSA, Association pour la Prévention de la Pollution Atmosphérique (APPA) avec le soutien de la Metropole Aix-Marseille et du Pôle de compétitivité Eurobiomed.
Le promoteur de l’étude Mistral est la société SAS MASK-AIR représentée par le Pr Bousquet. L’investigateur principal en charge du suivi de l’étude fut le Pr Denis CHARPIN (l’Association pour la Prévention de la Pollution Atmosphérique (APPA). Kyomed INNOV a assuré la gestion de l’étude.
Cette initiative a bénéficié d’un co-financement de l’Union Européenne avec les fonds Feder régionaux Provence-Alpes-Côte d’Azur.
Principes de l’étude
Innovante et inédite par son format 100% dématérialisé, l’étude s’appuyait sur différentes données prélevées en vie réelle pour déterminer l’impact de la pollution et des pollens sur les symptômes de rhinite allergique des sujets participants.
Pour cela, plusieurs sources d’informations ont été croisées et analysées :
- Les données collectées dans l’application MASK-air® à travers la surveillance quotidienne des symptômes de la rhinite et de l’asthme chez les sujets ;
2. Les données restituant la pollution de l’air en provenance des systèmes de collecte d’ATMOSUD et de du Finnish Meteorological Institute (FMI), en portant une attention particulière sur les polluants suivants : ozone (O3), dioxyde d’azote (NO2 )et particules fines PM2.5 et PM10.
3. Les données de concentration des pollens collectées par le Réseau National de Surveillance Aérobiologique (R.N.S.A.) avec un focus porté sur les graminées, le cyprès, l’olivier, le platane et les urticacées ;
4. Le conseil indépendant représenté par le Pr Charpin a assuré le suivi de l’étude. Pneumologue-allergologue de formation, ce dernier s’est imposé au niveau mondial pour son expertise dans le domaine de l’allergie au cyprès en zone méditerranéenne. Il est également président de l’Association pour la Prévention de la Pollution Atmosphérique (APPA).
Population étudiée
Les gestionnaires de l’étude ont fait appel à des moyens innovants et très diversifiés pour recruter les participants.
En effet, la promotion de cette étude a été diffusée sur différents canaux assez inhabituels en recherche clinique, notamment à travers des publications sur les réseaux sociaux, dans des webinaires ou encore sur des sites internet.
Sur la période de recrutement, 454 personnes sur les 1215 attendues ont été incluses, soit au final 14582 questionnaires remplis par les utilisateurs sur les 36440 attendus.
Âge de la population
• Âge moyen : 49,5 ans
• Âge minimum : 21 ans
• Âge maximum : 80 ans
Profil pathologique : « les participants souffrent de …» :
• Rhinite allergique : 100%
• Asthme : 23%
Symptômes rapportés
Les symptômes les plus fréquemment reportés par les participants sont:
• éternuements (37,2%),
• yeux qui démangent (35,4%)
• nez qui coule (34,8%).
Ci-dessous le détail des symptômes rapportés par la population étudiée:
Saisonnalité des réponses
Les participants ont davantage répondu aux questionnaires en hiver, probablement en raison du fait que la concentration des pollens de cyprès est plus importante à cette saison (ce pollen ayant été majoritairement rapporté comme allergène par la population étudiée).
Polluants
Les principaux polluants atmosphériques de la zone géographique de l’étude ont été identifiés grâce aux données recueillies auprès d’ATMOSUD, du RNSA et du Finnish Meteorological Institute (FMI):
• Le dioxyde d’azote (NO2) : polluant émis lors des phénomènes de combustion notamment dû aux activités de transport et d’installations de combustion.
• L’ozone (O3) : polluant issu de la transformation d’autres polluants dans l’air sous l’effet des rayonnements solaires.
• Les particules et particules fines (PM10 et PM2.5) : ce sont des particules en suspension de diamètre <10µm ou <2,5µm qui résultent notamment des phénomènes de combustion et de l’industrie manufacturière.
Concentration de NO2 en fonction des saisons et de la localisation
On observe peu de disparités de NO2 en fonction des saisons, avec une concentration légèrement plus élevée en hiver 2021/2022, ce qui est cohérent avec la saison.
Marseille comparativement aux autres villes et la zone d’étude est la ville qui a une concentration de NO2 la plus élevée.
Concentration d’O3 en fonction des saisons et de la localisation
Comme attendu, l’ozone présente une concentration plus élevée pendant les périodes chaudes de l’année, en particulier pendant les étés 2021 et 2022, en raison de l’exposition aux rayonnements solaires. En ce qui concerne sa répartition géographique, elle est relativement uniforme dans les différentes zones.
Concentration de PM10 en fonction des saisons et de la localisation
On observe peu de variations saisonnières des concentrations de PM10, à l’exception d’une légère diminution pendant l’automne. La concentration de PM10 reste similaire d’une zone géographique à l’autre, avec une tendance à des concentrations légèrement plus élevées près de l’Étang de Berre et de Marseille.
Concentration de PM2.5 en fonction des saisons et de la localisation
A la différence du PM10, les particules fine PM2.5 sont plus concentrées sur la période d’hiver. En effet, pendant l’hiver, les températures plus froides et les conditions de ventilation défavorables peuvent entraîner une accumulation des particules fines PM2.5. De plus, les émissions provenant du chauffage résidentiel et des activités industrielles augmentent souvent pendant cette période, contribuant ainsi à une concentration plus élevée de particules fines PM2.5 dans l’air.
La concentration de PM2.5 reste similaire d’une zone géographique à l’autre, avec une tendance à des concentrations légèrement plus élevées près de l’Étang de Berre.
Ce que l’on peut retenir des polluants
En résumé, la répartition des polluants varie en fonction de plusieurs facteurs tels que les sources de pollution, les conditions météorologiques, les activités humaines et la géographie. Concernant la répartition saisonnière, comme mentionné précédemment, les particules fines PM2.5 ont tendance à être plus concentrées en hiver en raison des conditions météorologiques et des émissions accrues liées au chauffage résidentiel. En revanche, l’ozone (O3) a tendance à être plus élevé pendant les périodes chaudes de l’année, en raison de la réaction chimique entre les précurseurs d’ozone et la lumière solaire.
Pollens
La présence de pollen dans l’air a été mesurée grâce aux capteurs du RNSA et a été restituée selon des modalités de score allant de 0 (absence de pollen) à 5 (concentration très élevée, exposition élevée). Les données spécifiques à l’environnement du sujet lui sont attribuées en fonction des coordonnées GPS récoltées lors de chaque utilisation de l’application par les participants. Les cinq pollens les plus représentés dans l’étude sont les suivants :
- les pollens de graminées,
- les pollens de cyprès,
- les pollens d’urticacées (pariétaire),
- les pollens de platane,
- les pollens d’olivier.
La figure ci-dessous illustre la variation des scores RNSA (de 0 à 5) pour chaque type de pollen au fil de l’étude.
Ce que l’on peut retenir des pollens
D’après les données fournies par le RNSA, les pollens de cyprès sont principalement présents à la fin de l’hiver et au printemps, tandis que les pollens de graminées et d’urticacées se trouvent au printemps et en été. Les pollens de platane et d’olivier sont également présents au printemps. Les pollens les plus couramment observés sont ceux de cyprès, suivis par ceux de graminées.
Dans la région de l’étude, les pollens de cyprès sont en effet présents principalement à la fin de l’hiver et au printemps. Les pollens de graminées et d’urticacées sont courants au printemps et en été, tandis que les pollens de platane et d’olivier sont également présents au printemps, comme indiqué dans le tableau suivant.
Impact des pollens, polluants et facteurs individuels sur les symptômes de rhinite allergique
Les résultats des différentes analyses réalisées font ressortir 3 variables significatives :
- Parmi les polluants : l’ozone (O3);
- Parmi les pollens : le cyprès;
- Au niveau individuel : l’âge.
L’ozone et le cyprès ressortent comme des facteurs aggravant les symptômes de la rhinite allergique. En revanche, l’âge est un facteur associé au contrôle de la rhinite allergique.
Par ailleurs, en explorant les interactions entre les variables de pollution de l’air, une interaction entre l’ozone (O3) et le dioxyde d’azote (NO2) a été identifiée et ressort comme un facteur aggravant les symptômes de la rhinite allergique.
En résumé
En résumé, cette étude confirme que l’âge (>50 ans) est un facteur favorable au contrôle de la rhinite allergique.
Le pollen de cyprès est clairement identifié comme le facteur le plus aggravant des symptômes de la rhinite allergique, ce qui est cohérent avec la présence abondante de cyprès dans la région étudiée.
L’O3 tout seul, ou associé au NO2, est un polluant de l’air identifié comme facteur aggravant les symptômes de rhinite allergique.
Ces résultats contribuent à une meilleure compréhension des facteurs de risque environnementaux de la rhinite allergique et soulignent la nécessité de mieux contrôler la pollution de l’air.
Une réponse sur « Résultats de l’Etude citoyenne Mistral »
Bonjour. Je salue vraiment l’initiative mais je suis très déçue par ce rapport. Je ne pense pas qu’il soit à même de faire évoluer les mentalités et les décisions de nos élus car il n’est pas étayé de chiffres quant à la sévérité de l’aggravation portée par les polluants sur les symptômes allergiques. Ainsi, ceux qui minimisent les effets des polluants sur la santé ne verront pas de raison tangible de changer de position. Je comprends les principes de la pédagogie mais je pense que la majorité d’entre nous est à même de comprendre une phrase du genre: les jours où le taux d’O3 était augmenté de .. %, les participants étaient … fois plus nombreux à rapporter tel ou tel symptôme. Cordialement.